Initiative Drépanocytose Afrique : Plaidoyer pour la prise en compte de la drépanocytose dans l’agenda mondial de la santé

26/03/2019 

La Fondation Pierre Fabre accompagne la mise en œuvre des politiques publiques dans la lutte contre la drépanocytose depuis plus d’une dizaine d’années.

Malgré les efforts fournis par les autorités sanitaires sur le continent africain, cette affection, qui concerne 50 millions de personnes malades et cause plusieurs centaines de milliers de décès chaque année, demeure une maladie « négligée ».

La drépanocytose est la maladie génétique la plus répandue au monde. Maladie de l’hémoglobine (qui sert à transporter l’oxygène à travers le corps), elle se manifeste par une anémie, une sensibilité aux infections, des crises très douloureuses causées par une mauvaise circulation sanguine et par le manque d’oxygénation des tissus (surtout des os), des crises vaso-occlusives à l’origine de complications majeures comme les accidents vasculaires cérébraux, le syndrome thoracique aigu et et l’ostéonécrose.

Chaque année, on estime que 300 000 enfants naissent avec la maladie dont 2/3 en Afrique Subsaharienne[1]. Sans prise en charge, la mortalité des enfants drépanocytaires est supérieure à 50%[2]. Le nombre de patients drépanocytaires va augmenter aussi bien dans les pays à haut qu’à bas revenus[3]. Le Nigeria, la République Démocratique du Congo (RDC) et l’Inde concentreront 57% des naissances d’enfants drépanocytaires majeurs[4].

Malgré ce tableau alarmant, la drépanocytose demeure un problème de santé mondial invisible.

Si les financements mobilisés en faveur de la lutte contre le VIH-sida, le paludisme et la tuberculose s’élèvent à 30 milliards de dollars US en 2017[5], on estime à seulement 20 millions de dollars US le montant des concours destinés chaque année à la drépanocytose ; dont une large part est affectée à la recherche.

En améliorant l’accès au diagnostic et au traitement grâce à une intégration de la maladie dans les programmes de santé mondiale, la lutte à grande échelle contre la drépanocytose participerait à l’atteinte de l’Objectif de Développement Durable 3.2 des Nations-Unies : « D’ici à 2030, éliminer les décès évitables de nouveau-nés et d’enfants de moins de 5 ans, tous les pays devant chercher à ramener la mortalité néonatale à 12 pour 1 000 naissances vivantes au plus et la mortalité des enfants de moins de 5 ans à 25 pour 1 000 naissances vivantes au plus. ».

Dans un souci de soutenir les dynamiques existantes au sein des différents pays impactés par la drépanocytose, la Fondation Pierre Fabre, principal acteur mondial dans la prise en charge de la maladie dans les pays du Sud, a organisé à Paris une rencontre d’une ampleur inédite sur les orientations politiques des pays et sur les stratégies régionales qui pourraient être envisagées, intitulé « Initiative Drépanocytose Afrique ». 

Cette rencontre a réuni les Ministres de la Santé du Nigeria et de Centrafrique, les représentants des Ministres de la Santé du Togo, Kenya, Burkina Faso et Burundi, des représentants de l’OMS et 14 experts de 11 pays africains et de l’Océan Indien.

Après avoir abordé les principales avancées et difficultés rencontrées dans la lutte contre la drépanocytose, l’« Initiative Drépanocytose Afrique » donnera lieu à la définition d’une stratégie d’intervention et des objectifs prioritaires ainsi que l’adoption d’une déclaration commune.

Déclaration commune

« Le mardi 26 mars 2019, à l’initiative de la Fondation Pierre Fabre, s’est tenue à Paris, la première réunion de travail intitulée « Initiative Drépanocytose Afrique » (IDA) en présence des représentants politiques, médicaux et scientifiques de onze pays d’Afrique : Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Kenya, Madagascar, Mali, Nigéria, République Démocratique du Congo, Sénégal et Togo. Le ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères français était également représenté.

Première maladie génétique au monde qui affecte très majoritairement les pays d’Afrique sub-saharienne, la drépanocytose a été reconnue par les Nations Unies comme priorité de santé publique en 2008. Cependant, l’absence de financements dédiés n’a pas permis de répondre aux besoins élémentaires de la population touchée par cette pathologie.

Après avoir échangé sur les principales avancées et difficultés rencontrées dans la lutte contre la drépanocytose pays par pays, les participants souhaitent interpeller la communauté internationale sur les urgences suivantes :

–        Promotion de la lutte contre la drépanocytose et inscription de son financement à l’agenda mondial de la santé.

–        Nécessité de mettre en place un dépistage néonatal ou précoce systématique dans des cadres légaux et nationaux.

–        Intégration du dépistage et de la prise en charge de la drépanocytose à tous les niveaux de la pyramide sanitaire. 

–        Lancement d’une « Initiative médicament » pour développer l’accès équitable aux médicaments essentiels de prévention et de prise en charge des complications.

–        Généralisation de la formation des professionnels de santé au diagnostic, à la prise en charge médicale et à l’accompagnement psycho-social.

–        Coordination nationale, panafricaine et internationale des Politiques et des Plans stratégiques de lutte contre la drépanocytose.

Par ce plaidoyer, Ies représentants des onze pays présents et la Fondation Pierre Fabre alertent les représentations internationales en Santé mondiale sur l’urgence d’agir en faveur des millions de malades drépanocytaires et de leurs familles. »

Signataires de la déclaration :

Dr Pierre SOMSE, Ministre de la Santé et de la Population de Centrafrique

Pr Isaac ADEWOLE, Ministre National de la Santé du Nigéria

Dr Cleopa Kilonzo MAILU, EBS, EGH, Ambassadeur Représentant permanent de la République du Kenya auprès de l’Office des Nations Unies à Genève

Dr Thelma Lorna NGUILELO, Directrice du centre de recherche et de prise en charge de la drépanocytose à Bangui, Centrafrique

M. Christian Maucler PAMATIKA, expert auMinistère de la Santé et de la Population de Centrafrique

Dr Oyebanji Ololade FILANI, Conseiller technique principal auprès du Ministre National de la Santé du Nigéria

Pr Iheanyi OKPALA, Professeur d’hématologie, Nigéria

Mme Hellen Mbugua-KABIRU, Conseillère santé, Représentation permanente de la République du Kenya auprès de l’Office des Nations Unies à Genève

Pr Jessie N. GITHANGA, Professeur agrégé, Université de Nairobi, Kenya

Dr Jamilla A RAJAB, Maître de conférences, Unité d’hématologie et de transfusion sanguine, Hôpital national Kenyatta, Kenya

Dr Robert KARAMA, Secrétaire Général du Ministère de la Santé du Burkina Faso

Dr Estelle-Edith DABIRE/DEMBELE, MD/MPH, Directrice de la Direction de la Prévention et du Contrôle des Maladies Non Transmissibles (DPCM) du Ministère de la Santé du Burkina Faso

Pr Eléonore KAFANDO, Professeur d’Hématologie, Université de Ouagadougou, Burkina Faso

Dr Jeanine AYINKAMIYE, Directrice Adjointe au programme de lutte contre les maladies non transmissibles auprès du Ministère de la Santé du Burundi

Dr Inés NSHIMIRIMANA, point Focal lutte contre la drépanocytose au sein du Programme National Intégré de Lutte contre les Maladies Chroniques non Transmissibles du Burundi

Pr Hèzouwè MAGNANG, représentant du Ministre de la Santé et de la Protection Sociale du Togo, Directeur du Centre National de Recherche et de Soins aux Drépanocytaires,

Dr Guillaume WAMBA, Médecin pédiatre, Président du Groupe d’étude de la drépanocytose du Cameroun (GEDREPACAM). Membre Fondateur du Réseau d’étude de la drépanocytose en Afrique Centrale (REDAC)

Pr Aimée Olivat RAKOTO ALSON, Professeur en hématologie, Chef du Laboratoire de référence en hématologie de Madagascar

Pr Dapa DIALLO, Professeur en hématologie, Directeur Général du Centre de Recherche et de Lutte contre la Drépanocytose de Bamako, Mali

Pr Aldiouma GUINDO, Professeur en hématologie, Directeur général adjoint au Centre de Recherche et de Lutte contre la Drépanocytose de Bamako, Mali

Pr Kodondi KULE-KOTO, Directeur général de l’Institut de Recherche en Sciences de la Santé, Président du Conseil Scientifique National, République Démocratique du Congo

Dr Benoît MBIYA MUKINAYI, Médecin pédiatre. Fondateur de la clinique pédiatrique de Mbujimayi, République Démocratique du Congo

Dr Ange Christian NGONDE MAMBAKASA, Médecin chef de l’unité de prise en charge de la drépanocytose à l’Hôpital Général de Référence de Makala, République Démocratique du Congo

Pr Sidy Mohamed SECK, Enseignant-chercheur à l’UFR des Sciences de la Santé du Sénégal

Pr Ibrahima DIAGNE, pédiatre, Coordonnateur du Centre de Recherche et de Prise en Charge Ambulatoire de la Drépanocytose du Sénégal

Pr Marc GENTILINI, ancien Président de la Croix-Rouge française, Président Fondateur de l’Organisation Panafricaine de Lutte pour la Santé (OPALS). Membre du Comité Scientifique de la Fondation Pierre Fabre.

Pr Robert GIROT, Chef du laboratoire d’hématologie Hôpital TENON. Président du Réseau Recherche Clinique de la drépanocytose

Dr Claire RIEUX, médecin humanitaire, spécialisée en hématologie,

Pr Gil TCHERNIA, Hématologue, Professeur honoraire à la faculté de médecine Pris XI

M. Jacques GODFRAIN, Administrateur de la Fondation Pierre Fabre, Ancien Ministre de la Coopération

Mme Béatrice GARRETTE, Directrice Générale de la Fondation Pierre Fabre

 [1] Modell B, DarlisonM, M Global epidemiology of haemoglobin disorder and derived service indicators. Bull WHO. 2008; 86(6):480.

[2] Grosse SD, Am J Prev Med, 2014.

 [3] Piel et al, Plos Med, 2013; Weatherall DJ, blood, 2010.

[4]  Piel at al, Plos med, 2013.

[5] OMS 2017.